Je vous parlais précédemment du métier de consultant et de la veille technologique associée, et cela m’a lancé sur une réflexion autour des différentes facettes que l’on regroupe sous ce titre.
L’objectif de cet article est plutôt simple : mieux percevoir l’activité du consultant, savoir quelles sont les compétences à travailler pour progresser et également quelles sont les possibilités d’évolutions qui s’ouvrent à ceux qui prennent leur carrière en main.
Cette vision de la chose est issue de mon expérience personnelle. Je suis donc évidemment preneur de votre retour sur le sujet, d’autant plus si vous utilisez une grille de lecture précise qui diffère de celle qui suit.
Pour faire simple je vais découper l’activité du consultant sur 5+2 domaines de compétences, 5 qui s’appliquent en mission, 2 en dehors. Je regrouperai ensuite ces domaines en 8 carrières classiques, ce qui permettra à chacun d’identifier son positionnement et le titre qui lui convient.
On commence donc avec les domaines de compétences en mission:
En Mission |
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Technologies |
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Activités | Connaissance des outils. Capacité à réaliser. |
Question associée | Comment faire |
Progression | Par techno, niveau de 1 à 5 : SSIS / SSAS / SSRS / SQL / DAX / MDX … |
Théorie du Décisionnel |
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Activités | Capacité à concevoir des solutions. Connaissance des techniques, de la modélisation. |
Question associée | Quoi faire |
Progression | Compréhension de l’activité, qualité des modèles, justesse des propositions et remarques… |
Fonctionnel |
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Activités | Connaissance des problématiques clients (RH, Finance, Retail, Industrie…). |
Question associée | Pourquoi le faire |
Progression | A travers les projets, en diversité, nombre et profondeur… |
Gestion de Projet |
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Activités | Faciliter le quotidien, gérer la logistique dans la mission, suivre l’avancement. |
Question associée | Quand / Combien |
Progression | Nb et type de projet (forfait / régie), méthodologies (V, Agile), outils planning et budget… |
Relation Utilisateur |
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Activités | Recueil du besoin, conduite du changement, assistance à la recette. |
Question associée | Qui |
Progression | Aisance générale, qualité des livrables, forme des presentations… |
Plus 2 domaines de compétence hors mission:
Hors Mission |
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Développement du Business |
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Activités | Avant ventes, construction de l’offre, contribution à l’image publique (blog, whitepaper…) |
Périmètre | Extérieur à l’entreprise |
Progression | Réussite des A/V, qualité de l’offre, qualité de l’image (appels entrants, canditatures spontanées…) |
Management |
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Activités | Gestion du groupe, formation, logistique entre les missions, accompagnement dans la carrière. |
Périmètre | Dans l’entreprise |
Progression | Qualité de la vision à long terme, Satisfaction des consultants, faiblesse du turnover, cooptation |
Maintenant qu’on a identifié les compétences, on va pouvoir positionner notre premier métier de consultant : le développeur junior, sur la grille.
Son premier chemin d’évolution naturel est de monter en compétence sur les technos, de prendre du recul et commencer à penser solution (théorie du décisionnel) et d’apprendre le fonctionnel à travers ses missions. Plus le bleu est sombre et plus la maîtrise est grande.
Mais devenir développeur sénior n’est pas sa seule option, il peut choisir d’évoluer vers les autres métiers du décisionnel, qu’on identifiera à partir de leur compétence majeure (bleu foncé):
On peut noter l’absence d’un expert de la relation client, qui à mon sens est en dehors du périmètre du consulting décisionnel et plus dans l’organisationnel. (Update 18/04/2012) David Tang me propose d’inclure le Formateur comme expert de la relation utilisateur, je trouve ça excellent, l’article est mis à jour en conséquence.
Cette liste je la reprends ici:
- Développeur : Il a déjà de nombreux projets derrière lui, il connaît les produits, les technos, il sait industrialiser les solutions, il développe en solo ou en équipe. Dans tous les cas, dans toutes les situations, il livre.
- Expert Technique : Il connaît les produits par coeur, toutes les astuces, tous les bugs classiques, toutes les optimisations. C’est lui qu’on appelle pour décoincer une production récalcitrante ou réussir à implémenter cette fonctionnalité qui nous résiste.
- Architecte : Il voit la solution de bout en bout, fabrique les prototypes, modélise le datawarehouse. C’est lui qui fait la jointure entre la technique et le fonctionnel, le guerrier du « Many to Many », c’est l’évangéliste de Kimball 😉
- Consultant AMOA – Assistance à Maîtrise d’Ouvrage: Lui sa spécialité c’est les problématiques des clients. Il connaît les métiers (la RH, le retail…), il sait parler aux utilisateurs pour extraire et transmettre les spécificités de leurs besoins aux autres membres de l’équipe.
- Chef de Projet : J’ai une notion très « Berkunienne » du chef de projet. Pour moi ce n’est pas un manageur, il ne dirige pas des hommes. C’est plutôt un facilitateur, qui fait tout pour que le projet se déroule sans accroc, pour que les autres membres puissent bosser tranquillement. C’est lui qui surveillera les plannings et les rapportera à qui de droit.
- Formateur : C’est lui qui répand la bonne parole, et les bonnes pratiques, à travers les centres de formation. C’est également lui qui met en place les événements, prépare les présentations et animation, et entretient l’effort de veille technologique au niveau du pôle.
- Ingénieur Avant Vente : Il accompagne les commerciaux en avant-vente, c’est lui qui gagne les missions et qui prépare l’arrivée de l’équipe projet. Evidemment il connaît le domaine décisionnel puisqu’il répond aux appels d’offres et participe aux chiffrages, qu’il anime des séminaires et qu’il représente l’équipe sur les salons. Il faut l’aimer, puisque c’est lui qui empêche les commerciaux de dire oui à tout 🙂
- Chef de Pôle : Le vrai manageur de la troupe, il accompagne les consultants dans leur carrière sur la durée.
Évidemment ces rôles ne sont pas exclusifs, on assume tous très souvent plusieurs casquettes en même temps, lorsque le périmètre est petit ou que les compétences manquent. Typiquement: le chef de projet / expert technique, qui encadre les juniors et répond à leurs questions techniques tout en remplissant les plannings quand il a le temps. On a aussi le chef de pôle / ingénieur avant-vente, tant que le pôle fait moins de 20 personnes. Et toutes les autres combinaisons qu’on peut imaginer.
Cela dit, et pour éviter de se diluer, il est bon de donner une orientation majeure à sa carrière, et donc de choisir un titre de prédilection dans la liste. Une fois qu’on a ce point de départ, on peut se projeter et choisir où l’on souhaite se retrouver dans 5 ans.
La progression s’effectue alors sur 2 axes: le premier c’est ajouter du bleu clair dans de nouvelles cases, et donc potentiellement agrandir sa collection de titre comme on collectionne les pokémons. Le second c’est foncer le bleu dans une case, et donc gagner en expertise sur un sujet. De cette manière on retrouve aussi les pokémons, sauf que cette fois ils évoluent:
- Le développeur s’endurcit, il sait réaliser tous les caprices exprimés dans les spécifications et jongle avec les 35 étapes requises pour la montée en production
- L’expert technique gagne en reconnaissance: confère Marco Russo, Chris Webb ou François Jehl, pour rester en Europe
- L’architecte se séniorise, et invente de nouveaux frameworks… Certainement l’évolution la plus casse gueule…
- Le consultant AMOA devient directeur d’étude
- Le chef de projet devient directeur de projet
- Le formateur devient évangéliste, que ce soit auprès de l’éditeur ou pour sa société
- L’ingénieur avant-vente devient responsable commercial
- Et le chef de pôle grandit avec sa troupe. Diriger 100 personnes ce n’est pas la même chose qu’en diriger 5.
Faîtes le bilan d’où vous en êtes, choisissez votre chemin de progression, et le tour est joué! Vous ne sécherez plus lors du prochain entretien quand on vous demandera « vous vous voyez où dans 5 ans? », votre arbre de compétences sera déjà tout tracé:
Apprendre un nouveau langage de programmation ou lire un bouquin de méthodologie? Choisissez l’option qui correspond à votre plan de carrière. On vous propose 2 missions, l’une orientée AMOA et l’autre gestion de projet? Même combat: choisissez la compétence qui est sur votre chemin de croissance. Formez vous en ligne, montrez votre travail à travers un blog ou une contribution Open Source… Soyez actifs, décidez de votre avenir et vous arriverez au but 🙂
Pour conclure sur ce sujet je m’adresse aux chefs de pôle et/ou aux responsables RH. Si vous en utilisez un, je pense qu’il est très bon de coupler le référentiel de compétences avec votre grille de rémunération pour obtenir des salaires distribués de manière objective (cf Joel Spolsky). Rien de tel pour motiver vos collaborateurs à prendre en main leur carrière. Tout le monde est gagnant!